C’est la nuit à bord de Crosscall, une nuit tranquille et noire, sous spi dans une quinzaine de nœuds de vent, une nuit sans changement de voile ni de direction, une nuit comme nous en avons eu assez peu depuis le départ.
Dans cette obscurité, rien d’autre que la phosphorescence du sillage du bateau… et des écrans où s’alignent cartes et chiffres, et qui guident notre trajectoire et notre performance.
Sur la carte d’abord, où nous affichons la route à suivre, en fonction du parcours, des prévisions météo et des routages. Mais parmi ces routages, selon les modèles météo pas toujours d’accord, et selon des options de route aux résultats proches, heureusement, c’est l’analyse et le jugement critique des marins qui permettent de trancher. Enfin quand ce jugement est éclairé, et là c’est la nuit, et des fois il fait nuit de jour !
Sur la carte toujours nous surveillons l’AIS, système permettant de repérer les autres navires et les éventuelles routes de collision, ou de surveiller les performances des concurrents en temps réel s’ils sont assez proches.
Puis il y a les chiffres qui s’affichent un peu partout dans le cockpit et à l’intérieur sur nos tablettes : Vitesse du vent, direction du vent, angle du vent avec le bateau, vitesse du bateau, cap du bateau… ça c’est pour la navigation. Et toutes les infos permettant de régler le pilote automatique : cap à suivre ou angle avec le vent à maintenir, complétés sur les pilotes de dernière génération, d’objectifs de gîte ou de vitesse à atteindre. Pour se rassurer, on prend la barre, et souvent encore, on fait mieux que le pilote, mais pas toujours, et on fatigue plus vite, mais qu’est-ce qu’il bouffe?
Puis il y a LE chiffre : le pourcentage de vitesse cible, qui indique en temps réel, le pourcentage de la vitesse théorique optimale du bateau à laquelle nous naviguons : 90%… « au boulot feignasse, règle-moi l’camion »… 105%… « t’es un champion, t’as bien mérité un pépito ! » La pertinence de cet indicateur tient au travail en amont pour connaître les performances théoriques optimales, travail que nous n’avons pas encore fait. Nous nous basons donc sur des données théoriques… nous avons mangé beaucoup de pépitos…
Pour surveiller toutes ces données, même en dormant, il y a les alarmes, en cas de route de collision, de changement de direction ou de force du vent, de vitesse trop basse… ah oui il faut une enceinte pour que l’alarme retentisse… rajoute une ligne sur la joblist !
Voilà, c’est la nuit à bord de Crosscall, une nuit noire, tranquille, un peu fraîche, un peu humide, je crois que c’est pour ces moments-là qu’on a inventé les nouilles chinoises.
Tout va bien à bord de Crosscall …
Aurélien et David